Pourquoi est-ce si difficile de déléguer ?

 

 

 

Dans les accompagnements que je fais en entreprise, j’observe tellement souvent cette difficulté à déléguer. Déléguer totalement. Donner un champ à un autre et ne pas chercher à contrôler, seulement à être là si on a besoin.

La surcharge de travail vient souvent de cela. De la croyance que je suis un bon professionnel si j’ai accès à tout, si je vois tout, si je supervise tout et si je fais tout .c’est un excès de perfectionnisme et un égo qui a besoin de se nourrir d’une boulimie de faire et de connaitre.

Déléguer , c’est se dessaisir d’une partie de ce qui est dans mon territoire , dans ma zone de responsabilité , en mon pouvoir , et , cette partie , il faut que je la confie à une autre personne qui fera le travail à ma place .oh certainement pas comme je le ferai , certainement pas à ma vitesse , avec  ma façon de faire .. Et c’est bien souvent cela qui freine.

L’autre personne à son identité propre, déjà  par sa place au sein de l’entreprise, mais bien au-delà, dans sa manière de faire.

Déléguer me demande de faire confiance. Et, pour cela il faut que je sorte de la toute-puissance de la peur. Si j’ai peur des délais, des résultats, des enjeux, des impacts, des personnes … alors, déléguer devient tellement un problème pour moi que non seulement je ne délègue rien, mais bien souvent au contraire je prends en charge des problèmes, des projets qui ne dépendent pas de moi.

Comme si la peur de déléguer était la joie de posséder encore plus.

La délégation n’est jamais un problème d’organisation du système, mais bien toujours un problème d’égo de celui qui a le pouvoir.

L’ego surdimensionné se manifeste dans cette incapacité à déléguer. Comme si une partie de moi, qui n’est pas tout moi, ne peut pas s’empêcher de s’activer quand un problème survient.

L’ego surdimensionné est un égo malade, qui se soigne jour après jour avec une boulimie de faire, de posséder, de contrôler.

Cet égo malade qui se manifeste souvent au quotidien des journées par de la  colère, de l’irritation, des reproches, des injonctions et des ruptures avec tous ceux qui ne suivent pas ma manière de penser.

et les rares fois où la personne arrive à  déléguer, elle trouve toujours un moyen à un moment ou un autre pour remettre son nez dans le contexte et cela nourrit en elle, alors, la certitude qu’elle est indispensable.

La maladie de l’égo surdimensionné qui se manifeste par de la colère est pourtant le fruit de la peur. Et des peurs qui ne sont jamais regardées, qui sont sous-jacentes.

Je sais, aujourd’hui que l’égo surdimensionné n’est que la face cachée d’un égo fragile.

Et tout le système se nourrit : j’ai un égo surdimensionné, alors je prends le pouvoir, et je me charge de travail,  de responsabilités et je rentre dans une course folle vers je ne sais quelle chimère que je n’attrape jamais.

Souvent quand je reçois ces personnes, très vite je leur dis «  et la notion de lâcher-prise  que signifie-t-elle pour vous ? J’ai souvent en réponse, soit un grand vide, soit un rire ironique comme si le lâcher-prise était bon aux fainéants, aux irresponsables, aux créatifs, aux farfelus, bref aux personnes qui n’étaient pas dans la course.

Dans l’entreprise, qui a la vocation de croitre, de produire, de répondre aux besoins du client, le monde de l’égo surdimensionné a le terreau idéal pour que les jeux de pouvoir se mettent en place .Alors les lignes sont floues, et tout le monde essaye comme il peut de tirer son épingle du jeu.

On glorifie celui qui en fait le plus, celui qui grimpe le plus vite, les succès.

Mais quand on parle un tout petit peu avec les personnes en entreprise : on s’aperçoit que plus personne n’a envie de jouer à ces jeux-là.

Je crois qu’à côté de cette course effrénée, il y a pleins d’expériences de tout genre, dans le monde de l’entreprise comme dans d’autres : certains font le choix d’une une autre temporalité. : Celle de la lenteur, de  la confiance, du lâcher-prise.Cela se manifeste par  la délégation, la concertation, la non-violence, la bienveillance. Cela répond non seulement à une aspiration de tous, mais, c’est, je crois  le seul chemin réellement efficace.

Alors si vous aspirez à ce nouveau monde, commencez donc à regarder ce que vous déléguez et comment vous le faite.

Arrivez-vous à le faire, à la faire totalement, sans arrières pensés de crainte ou de contrôle ?

Si c’est oui, vous participez ainsi à redonner le vrai sens au sein de votre entreprise. Celui de faire ensemble.

Si c’est non, vous savez maintenant que vous nourrissez un ego malade qui demande encore et encore. Votre travail est de trouver non plus comment le nourrir, mais comment le soigner.

 

Novembre 2017

Isabelle Flye Sainte Marie

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